Un petit peu d'étymologie... 
(Mise à jour : janvier 2020)

Voici la contribution de Gérard Baudrier

L'animal domestiqué le moins modifié par l'homme ?
Parmi les 210 espèces d'ongulés, 16 seulement ont été domestiquées, et une seule famille (les camélidés) s'est avérée idéalement adaptée aux conditions d'élevage en milieu désertique.
En terme d'évolution, le processus de domestication implique de nombreuses modifications d'une espèce animale. Un même schéma est retrouvé par exemple chez les différentes races de chats, mais pas chez le dromadaire. Les analyses génétiques de 1.100 dromadaires montrent, en comparaison à un échantillon vieux de 7.000 ans, une très grande diversité génétique, comme on pourrait le constater pour une population d'une espèce sauvage non-influencée par l'homme. Ce taux presque naturel de variabilité génétique s'explique par la principale fonction des dromadaires domestiqués, le transport : les nomades voyageant sans cesse, leurs groupes de dromadaires sont toujours amenés à en croiser d'autres, et donc à s'accoupler. Un flux de gènes constant ainsi développé permet de maintenir une telle diversité génétique au sein de l'espèce. A tel point qu'à ce jour, une seule population de l'est Africain dérive du reste des dromadaires du fait d'une isolation géographique et de barrières culturelles, selon les chercheurs. En somme, il se pourrait bien que le dernier Camelus dromaderius sauvage ait vécu ses derniers jours il y a plus de 3.000 ans avant notre ère.

La domestication du dromadaire ayant probablement eu lieu dans le sud de la péninsule arabique dès le 2e millénaire, l’emploi de la racine sémitique, unité abstraite minimale composée exclusivement de consonnes  gml pour désigner cet animal devrait provenir de son ancienne appellation proto-arabe. On la retrouve plus tard dans l’akkadien gammalu  et dans l’hébreu גָּמָל  gamal, en arabe : jamal  جَمَل   et en syriaque : gamlā  ܓܲܡܠܵܐ . . (voir livre l’art Antique du proche Orient  page 424 image 685 délagation  bactrienne  آپادانا , āpādānā « salle du trône » de Persepolis façade est de la terrasse 5è siècle avant notre ère.  Au 6e siècle, sous l’influence de l’Assyrie où il était appelé bakru (Annales d’Assurbanipal, IX), l’hébreu ancien s’est mis à le désigner par le substantif masculin בֶּכֶר  beker lié à la forme verbale bakar, « donner naissance au premier-né », mais aussi au substantif homophone baqar בָּכַר  bakar trouvé 4 fois dans la Bible. Ce terme  traduit  par premier né, premier enfantement. (où le kaf ou khaf ou kaph ך / כ /k/ est remplacé par un qof ou qoph ק /k) qui se rapporte aux gros bestiaux de tout âge et de tout sexe. Un suffixe féminin lui fut alors appliqué pour désigner sa femelle (בִּכְרָה   bikrah* Phonétique bik-raw’ : une jeune chamelle, jeune chameau, dromadaire בֶּכֶר  Beker Phonétique beh’- ker "jeune chameau"  mot trouvé 5 fois dans la Bible
Dans Bible  תנך ▼Prophètes נביאים ▼Jérémie  ירמיהו ▼  Jérémie chapitre  2 verset 23).

Comment dirais-tu: Je ne me suis point souillée, Je ne suis point allée après les Baals? Regarde tes pas dans la vallée, Reconnais ce que tu as fait, Dromadaire à la course légère et vagabonde!

 אֵיךְ תֹּאמְרִי לֹא נִטְמֵאתִי אַחֲרֵי הַבְּעָלִים לֹא הָלַכְתִּי רְאִי דַרְכֵּךְ בַּגַּיְא דְּעִי מֶה עָשִׂית בִּכְרָה קַלָּה מְשָׂרֶכֶת דְּרָכֶיהָ

éykhe tthomeriy lo niteméthiy ah'aréy habe'aliym lo halakhetthiy reiy darekékhe baggaye dde'iy mèh 'asiyth bikherah qallah mesarèkhèth dderakhèyha 

Merci à Gérard Baudrier pour sa très complète contribution.

D'après un mail que nous a gentiment envoyé François Guével

Les annuaires du téléphone en Bretagne (France) contiennent un certain nombre d'abonnés au nom de Guével, ( en breton "gevel" car la lettre g est gutturale).
Ce nom veut dire "jumeau, jumelle" ou encore " outil formé de 2 parties identiques comme pinces ou tenailles". Son origine probable vient du latin "gemellus" prononcé "guemellus" en latin classique et "jemellus" en latin tardif. Ce mot latin signifiait "jumeau, jumelle" et aussi un adjectif "formé de 2 parties identiques".
Le "gemellus" latin vient lui-même du phénicien "gamal" qui signifiait "chameau" (animal à 2 bosses) et aussi une "arme de guerre courbe en 2 parties", ressemblant au boomerang australien et qui existait dans l'antiquité moyen-orientale.
Ce gamal phénicien est à l'origine non seulement du "gemellus" latin, mais encore du "kamelos" grec à l'origine du "camellus" latin (chameau), et encore du "gamma" grec comme du "guimel" hébraïque et de bien de prénoms sémitiques commençant par K (Kamal, Kamel) ou G (Gamal) ou DJ (Djamel, Djamilia) ou J (Jamal, Jamilia) selon les dialectes arabes ou encore le k`h hébraïque.
Il semblerait aussi que ce même mot phénicien "gamal" soit à l'origine du mot grec "kamara" et du mot latin "camera" signifiant d'abord "voûte" avant de prendre le sens de "chambre", tant il est vrai que le chameau a le dos voûté. Cette filiation reste une hypothèse cependant.

Merci à François Guével pour ces précisions érudites !!

Cette interprétation est toutefois contestée par un autre email reçu de Mr Julien Wyplosz

D'après lui, Chameau ne vient pas du latin gemellus qui veut dire jumeau mais de camelus attesté depuis Pomponius selon Ernout et Meillet. Dictionnaire étymologique de la langue latine; Paris. Lincksieck. II a été transmis par le grec (camelos).
Tournons-nous vers alors vers Chanteraine, Dictionnaire étymologique de la langue grecque. Paris. Klincksieck:

Attesté depuis Eschyle.
Emprunt certain du sémitique occidental : comparer hébr. Gâmâl. Le mot n’étant pas attesté en phénicien. Passage ionien de en . De viennent skr kreméla- (altéré depuis krâmale marcher)
Pour ma part, je suis toujours en accord avec Meillet mais rarement avec Chanteraine.
En hébreu, la racine GML a deux significations possibles :
L’une veut dire récompenser, qui ne paraît guère convenir bien que le chameau serve de monnaie d’échanges chez les bédouins, notamment pour acheter les femmes.
L’autre veut dire sevrer et semble bien convenir car il veut dire priver de lait ou pour le chameau d’eau, ce qui peut convenir.
Je me permets d’ajouter que les Grecs appelaient Phéniciens(les Rouges en grec car ils vendaient la pourpre) tous les sémites qui leur semblaient parler la même langue. Les Phéniciens , meilleurs navigateurs qu’eux et qui ont détenu la mouvance sur la Méditerranée jusqu’à Alexandre, leur étaient les plus familiers car ils venaient en Ionie. Il est intéressant de noter que pour les Hébreux les Grecs sont des Iawanim : Ioniens pour des raisons inverses.

Voila pour la mise au point de Mr Julien Wyplosz. Nous le remercions beaucoup

Maintenant, un mail de Roger Warin qui nous donne sa vision sur cette étymologie

La domestication du dromadaire ayant probablement eu lieu dans le sud de la péninsule arabique dès le IIe millénaire, l’emploi de la racine sémitique gml pour désigner cet animal devrait provenir de son ancienne appellation proto-arabe. On la retrouve plus tard dans l’akkadien gammalu et dans l’hébreu gamal. Au VIe siècle, sous l’influence de l’Assyrie où il était appelé bakru (Annales d’Assurbanipal, IX), l’hébreu ancien s’est mis à le désigner par le substantif masculin beker lié à la forme verbale bakar, « donner naissance au premier-né », mais aussi au substantif homophone baqar (où le kaph est remplacé par un qoph) qui se rapporte aux gros bestiaux de tout âge et de tout sexe. Un suffixe féminin lui fut alors appliqué pour désigner sa femelle (bikrah chez Jr 2:23).

Les Grecs n’ont retenu que la forme la plus commune au Levant : gamal / gamel / gemel, qui a donné kamelos, devenu camelus en latin.

Il va de soi que ces termes ne concernaient que Camelus dromædarius et non Camelusbactrianusqui a deux bosses et était inconnu au Proche-Orient.

Merci à Roger Warin pour ces précisions.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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