Adaptation du dromadaire à la sous-nutrition minérale
(septembre 2001)

Complémentation de jeunes dromadaires
Complémentation de jeunes dromadaires
à Djibouti (photo B. Faye)

Le dromadaire est connu pour sa résistance à la soif, à la chaleur, à la sous-nutrition protéique. Face aux contraintes du milieu désertique, il a développé un ensemble de facultés physiologiques remarquables qui lui ont conféré sa réputation légendaire. Des travaux menés depuis plusieurs années en collaboration très étroite par le Cirad, l'Institut agronomique et vétérinaire Hassan II, à Rabat, et les facultés des sciences de Casablanca et de Settat, au Maroc, ont permis de mettre en évidence des particularités physiologiques témoignant également de son adaptation à la sous-nutrition minérale.
Ainsi, le taux élevé de vitamine D3 (10 à 15 fois plus élevé dans le sang du dromadaire que dans celui des autres ruminants) contribue à expliquer une meilleure assimilation du calcium et du phosphore. La résistance des globules rouges aux déséquilibres osmotiques permet également de concentrer des quantités importantes de chlore ou de sodium. On sait, de fait, la capacité peu commune du dromadaire à ingérer des fourrages et de l'eau salés sans que ses fonctions métaboliques soient affectées.

Quelques constats

Concernant les éléments traces, trois faits remarquables sont à retenir :

  • le dromadaire semble avoir des besoins plus faibles en cuivre, par rapport aux autres herbivores domestiques. Ce fait est attesté non seulement par une concentration plasmatique plus faible, mais aussi par un maintien de l'activité oxydasique de la céruloplasmine, une protéine de transport du cuivre dans le sang, en cas de déficit en cuivre de la ration. Des travaux sont en cours pour isoler et purifier cette céruloplasmine ;
  • les besoins du dromadaire en zinc sont faibles en comparaison des autres herbivores domestiques. Du reste, la concentration plasmatique en zinc n'est pas influencée par un apport supplémentaire dans la ration ou par injection. En dépit d'un taux plasmatique presque moitié inférieur à la vache, le dromadaire maintient parfaitement ses activités enzymatiques zinc-dépendantes ;
  • le dromadaire apparaît très sensible à la supplémentation en sélénium : alors qu'avec un apport de 2mg/j, le taux circulant est multiplié par un facteur 2 chez la vache, il est multiplié par 10 chez le dromadaire, ce qui lui permet en phase de déplétion de maintenir plus longtemps l'activité enzymatique de la glutathion-peroxydase, enzyme seleno-dépendante qui joue un rôle protecteur au niveau cellulaire.
Evolution comparée du taux de sélenium plasmatique
Evolution comparée du taux de sélenium plasmatique
chez la vache et le dromadaire recevant la même
ration alimentaire (B. Faye)

Les signes d'une adaptation

En résumé, tout se passe chez le dromadaire comme si son métabolisme était tourné vers une anticipation des périodes de sous-nutrition minérale. Il signe son adaptation à ces périodes de restriction alimentaire par divers mécanismes : augmentation des capacités d'absorption en cas de pénurie, plus grande capacité de stockage de certains éléments minéraux, plus grande tolérance à certains électrolytes, maintien des activités enzymatiques de base en dépit des situations déficitaires.
L'adaptation au désert signifie un ensemble de petits perfectionnements métaboliques qui, pris isolément, n'apportent qu'un avantage comparatif somme toute resteint, mais qui, pris dans leur ensemble, donnent sens à la réputation de cette espèce, seule capable, parmi les grands mammifères domestiques, à survivre dans les conditions que lui imposent les milieux désertiques.

Pour en savoir plus

Faye B., 1997. Le guide de l'élevage du dromadaire. Ed. Sanofi, Libourne

Faye B., Meyer C., Marti A., 1999. Cd-Rom "le dromadaire". Ed. Cirad, Montpellier

Faye B., Bengoumi M., 2000. Le dromadaire face à la sous-nutrition minérale : un aspect méconnu de son adaptabilité aux conditions désertiques. Sécheresse, 11 (3) : 155-161

Contact :

Bernard Faye, chef du programme productions animales
Cirad, TA 30/A, Campus International de Baillarguet, 34398 Montpellier Cedex 5, France
bernard.faye@cirad.fr

 


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