Dromadaire et vitamine C
(juillet 2002)

La réputation du lait de chamelle est en grande partie due à sa richesse en vitamine C. De tous les laits de mammifère collectés pour les besoins de l'homme, celui de la chamelle est le plus riche en cette vitamine dont le rôle tonique permettant de lutter contre la fatigue et l'infection est bien connu. Il y a en moyenne 3 fois plus de vitamine C dans le lait de chamelle comparé au lait de vache. Cela dit, les facteurs de variation de la teneur en acide ascorbique, l'autre nom de la vitamine C, dans le lait sont très peu étudiés. Désormais, nous disposons de travaux de base réalisés par un chercheur soudanais (Dr Hassab Hussein Elkhidir) dans le cadre d'une thèse soutenue le 3 juin 2002 à l'Université d'Utrecht.

La vitamine C joue un rôle biologique considérable par ces propriétés anti-oxydantes. Récemment, il a été montré qu 'elle avait aussi une action positive sur la réponse immunitaire des organismes agressés par diverses maladies. Le travail original de la thèse est d'avoir précisé les facteurs de variation dans les conditions d'élevage naturel. Les travaux ont été menés dans la région de Butana dans le Soudan central. Les indicateurs du statut vitaminique des chamelles ont été la concentration en acide ascorbique dans le sang, les leucocytes (globules blancs), les organes et le lait.

Indépendamment de la saison, les organes les plus riches en vitamine C sont le foie (60 mg/100g de tissu) et surtout les glandes surrénales (151 mg), le plus pauvre étant le cœur (8 mg seulement). On observe des variations selon les races de dromadaire, le type Arabi étant plus doté que le type Anafi, lui-même mieux pourvu que le Bishari. En revanche, on n'observe pas de variations liées au sexe de l'animal. Cependant, les femelles excrètent plus de vitamine C dans l'urine que les mâles. Par ailleurs, le taux de vitamine C dans les organes et le plasma diminue pendant la période sexuelle aussi bien chez le mâle que chez la femelle. Ainsi, l'oestrus comparé à la période de non-oestrus est associé avec des concentrations de vitamine C plus importantes dans le sang et les leucocytes. Les femelles lactantes non-gestantes présentent également des concentrations plasmatiques plus élevées (5mg/l) que les femelles en gestation (3,77) et les femelles taries non gestantes (4,34). Par ailleurs, le taux de vitamine C dans le plasma et les leucocytes augmente significativement après les 6 premiers mois de lactation. On remarque une évolution parallèle entre les teneurs sanguines et lactées. Les chamelles multipares ont plus de vitamine C dans leur lait que les primipares, et les chamelons nouveau-nés ont plus de vitamine C dans leur plasma que les mères, puis cela se stabilise après 4 semaines pour atteindre des valeurs similaires à la mère chez qui la tendance est à l'accroissement après la parturition (voir figure). Le colostrum est d'ailleurs plus riche en vitamine C que le lait, signant ainsi le rôle de transfert actif de la mère vers le jeune.

L'alimentation de la chamelle semble jouer un rôle non négligeable, les rations à base de pâturages naturels étant moins favorable sur la concentration en acide ascorbique dans le plasma et les leucocytes que des rations contenant de la luzerne par exemple. Les maladies parasitaires telles que la gale sarcoptique et la trypanosomose sont associées à une diminution des teneurs dans le plasma et les leucocytes. Chez les animaux cliniquement affectés par la trypanosomose, cette chute est particulièrement marquée : la teneur dans le plasma par exemple passe de 5,8 mg/l en moyenne chez les animaux sains à 1,8 chez les animaux malades. La même évolution est observée dans le foie (de 62,9 à 33,2 mg/100g de tissu). Les maladies infectieuses (brucellose, mammites) présentent le même impact bien que moins marqué. Sans pouvoir préciser si cette chute est une cause ou une conséquence de la maladie, on peut cependant affirmer que la vitamine C joue un rôle essentiel dans la résistance à l'infection. On peut du reste en déduire que les femelles en période de repos sexuel ou en début de lactation sont plus résistantes. Cela dit, l'effet immuno-stimulant de l'acide ascorbique, notamment dans des situations de stress (travail intense par exemple) mériterait d'être approfondi. En attendant, voilà un travail de thèse qui représente une avancée notable dans la connaissance du statut de la vitamine C chez une espce réputée pour un lait qui remplace aisément les oranges de ce point de vue….



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